Posté en tant qu’invité par Ararat:
extrait de LE MONDE 17.08.06
LES CONTAMINES-MONTJOIE (Haute-Savoie) ENVOYÉ SPÉCIAL
[i]Un tour du Mont-Blanc, avec des amis ou en famille ? L’idée est tentante, mais objectera-t-on, où dormir ? Au simple mot de « refuge », la plupart des participants pressentis, quel que soit leur âge ou leur sexe, poussent généralement des hauts cris : « Inconfort, promiscuité, hygiène insuffisante… Jamais ! »
Les refuges n’ont certes pas bonne réputation auprès des randonneurs de haute montagne, qui apprécient de pouvoir vraiment se reposer après l’effort. Pourtant, un peu plus bas, en moyenne montagne, existent désormais des refuges confortables. Entre Saint-Gervais et Courmayeur, en Italie, sur le passage du mythique GR, une partie de ces hébergements viennent d’être rénovés. Désormais, ils répondent aux attentes de ceux qui ne veulent pas vivre « à la dure » comme certains montagnards.
A 1 460 mètres d’altitude, au bout de la vallée des Contamines (Haute-Savoie), l’un des départs du tour du Mont-Blanc, le refuge de Nant-Borrant surprend par sa façade coquette aux balcons sculptés, au-dessus d’un jardin fleuri. A l’intérieur, le goût pour la décoration de Patricia Mollard, la propriétaire, se confirme. Bibelots, meubles rustiques, vaisselle… : chaque détail est étudié.
Même impression favorable dans les petits dortoirs de 5 à 9 places avec couettes et rideaux assortis. « Depuis que j’ai pris la succession de ma grand-mère en 1999, de plus en plus de familles avec enfants s’arrêtent chez nous, raconte Patricia Mollard. Elles veulent pouvoir se retrouver dans la même chambre et apprécient un joli décor. »
Près de 500 mètres plus haut en altitude, Marielle Tuaz n’a pas eu la tâche facile pour rénover le refuge de Tré-la-Tête, planté au-dessus de la vallée de Saint-Gervais. Elle a pourtant réussi à installer des lits individuels en fer forgé dans ses chambres aux murs lambrissés. Et les douches chaudes sont comprises dans la demi-pension.
« C’était une nécessité d’offrir plus de confort aux marcheurs, en particulier aux femmes et aux personnes âgées, explique Marielle Tuaz, forte de ses quinze années d’expérience dans les refuges du Club alpin français (CAF). Simplement, la clientèle ne doit pas avoir les mêmes exigences qu’à l’hôtel. La montagne, ce n’est pas pour se faire mal, mais on n’y retrouvera jamais les conditions de la vallée. » Le refuge de Tré-la-Tête a conservé le dortoir traditionnel « pour les petits budgets ». Mais cette grande salle ne compte plus que 44 couchages au lieu des 72 matelas du temps du CAF.
Sur l’autre versant du Mont-Blanc, les Italiens du Val d’Aoste vont encore plus loin dans la qualité de l’accueil. Le refuge Walter-Bonatti, à plus de 2 000 mètres d’altitude, en face des Grandes Jorasses, ressemble plus à un gros hôtel qu’à un refuge. Construit en 1998 par une société privée, il peut accueillir 80 personnes en chambres de 2 à 4 personnes et en dortoirs.
Tout y est étudié pour la qualité du séjour : literie, sanitaires, salle de restauration. Un peu moins de charme sans doute qu’un refuge traditionnel, mais des conditions idéales pour récupérer. Les installations respectent cependant le milieu riche et fragile de la montagne. « L’établissement a été construit pour obtenir la certification Haute qualité environnementale, détaille Mara Rizzo, la gardienne. Nous traitons nos eaux usées, et même les produits pour la douche sont biodégradables. Les sols sont lavés à la vapeur et l’électricité est produite avec une turbine sur une source et un torrent. »
L’atmosphère est tout autre chez Giacomo Calosi, le jovial gérant du refuge Maison-Vieille, à 1 956 mètres, au-dessus du Val-d’Aoste. « L’accueil est essentiel pour des personnes qui arrivent fatiguées après des heures de marche, dit-il. L’ambiance qui règne ici est donc très importante. Nous faisons en sorte que les repas soient une véritable célébration des produits de la région. Mais nous avons aussi compris qu’il fallait améliorer les couchages et les sanitaires, avec des douches chaudes par exemple. »
L’initiative de proposer des hébergements de meilleure qualité autour du Mont-Blanc revient à l’Espace Mont-Blanc, une structure de coopération transfrontalière entre la Vallée d’Aoste, en Italie, et les pays de Savoie et de Haute-Savoie. Plus de 4,5 millions d’euros sont consacrés à la rénovation d’une partie de ces 200 refuges entre la France et l’Italie. « Deux cents ans exactement après la première ascension du Mont-Blanc, c’est un moyen de développer un tourisme respectueux de la montagne », résume Serge Tuaz, chargé de mission à l’Espace Mont-Blanc. [/i]
Christophe de Chenay
[%sig%]