L’ENSM et la Petite Université ont le plaisir de vous inviter à la soirée « LA MORT EN MONTAGNE, Une approche sociologique. » le Mardi 12 Décembre à 20h à l’amphithéâtre de l’ENSA.
« La mort peut s’approcher de multiples manières : psychologique, démographique, médicale, statistique, poétique, artistique, philosophique… Dans cette conférence, c’est une perspective sociologique que l’on retiendra pour approcher ce sujet à la fois mystérieux, difficile et passionnant, car l’on considère que la façon qu’ont les sociétés de concevoir la mort est une entrée particulièrement pertinente pour comprendre ce qu’elles sont, leurs valeurs, leurs cultures et leur rapport à la vie. En effet, les représentations que l’on peut se faire de la mort ne relèvent pas seulement de logiques intimes mais également de logiques sociales historiquement et géographiquement situées. Et c’est à partir de ce postulat que l’on va aborder la question plus précise de la mort en montagne.
Dans la vallée de Chamonix, la familiarité avec cette forme de mort violente est évidente, et l’on peut légitimement se demander comment les chamoniards la vivent. Les questions sont de faits multiples : Est-ce qu’ils acceptent d’autant mieux ce type de mort qu’ils y sont habitués ? Quel est l’impact de cette familiarité avec la mort en montagne sur les représentations qu’ils s’en font ? Une représentation courante, véhiculée à la fois par le grand public et parfois par les alpinistes eux- mêmes, qui consiste à présenter cette mort comme une belle mort, héroïsante, emprunte de la positivité de la passion et des valeurs positives associées à la haute-montagne (beauté, grandeur, liberté, etc.), est-elle juste ? Est-elle réellement partagée chez ceux qui vivent ces drames de près ?
A partir d’une analyse sociohistorique de l’esprit de l’alpinisme et des éthiques émergeantes contemporaines, nous verrons en quoi les représentations de la mort en montagne et les pratiques de la montagne s’articulent et évoluent ensemble. Nous évoquerons notamment la polarisation croissante des éthiques à laquelle on assiste aujourd’hui, avec d’un côté le durcissement des normes de sécurité dans le petit alpinisme et la radicalisation de l’idéal sécuritaire, soutenus par un discours professionnel engagé en faveur de la préservation de la population, et de l’autre la défense tout aussi radicale d’une éthique de l’excellence alpinistique héritée du XIXe siècle, qui implique nécessairement d’accepter la possibilité de la mort, voir pour certains de la revendiquer.
Plus généralement, nous nous intéresserons aux questions du rapport des individus à la mort et au risque dans nos sociétés occidentales contemporaines, et sur les enjeux concrets, au-delà des idées, contenus dans le débat entre liberté et sécurité, toujours très actif dans la communauté montagne. »
Intervenante :
Juliette Craplet, Sociologue et Présidente de La Petite Université.
Juliette vous présentera les résultats d’une étude de deux ans sur le sujet dans le cadre de son master de sociologie où elle s’est intéressée spécifiquement aux discours des professionnels - guides de haute-montagne, secouristes et formateurs - pour qui l’accident mortel et la recherche de son évitement sont au cœur à la fois de leur travail et de leurs pratiques amateurs.
Entrée libre et gratuite, ouverte à tous et à toutes.