Je pense que les activités incluant des risques doivent rester un engagement personnel et librement consenti. A l’exception d’un faute intentionnelle ou inexcusable, on ne devrait pas pouvoir mettre en cause qui que ce soit, professionnel, amateur, encadrant. Sans doute à contre courant d’une société qui se judiciarise et qui prône fallacieusement le risque zéro (ex. au nom d’économies sur les secours? ) , l’engagement individuel doit rester à l’essence même de ces pratiques. Devra-t-on signer une déclaration de non-recours dans ce sens, un peu à la manière dont on accepte ou pas le prélèvement d’organes ?
Avalanche et responsabilité juridique
Oui je ne sais pas quel terme employer. J’ai déjà ressenti ce genre de chose, le besoin d’un coupable, qui peut être destructrice, qu’il faut apaiser.
L’article envoyé par ben me semble bien argumenté.
Il reste des questions sans réponse pour l’instant :
- pourquoi avoir opté pour la traversée alors qu’il était possible de contourner en voiture (4h de route, mais possible) ?
- pourquoi le groupe était il regroupé dans une zone à risque, plutôt que ds une endroit hors risque, ou avec des espacements ?
- pourquoi le guide n’a-t-il pas essayé de dégager les autres ensevelis après son propre dégagement (1h), les chances de survie étant alors faibles, mais non nulles ?
Il n’est pas possible de prévoir les avalanches avec certitude, mais il était peut-être possible de diminuer le risque. Les questions par les familles me semblent légitimes…
Il ne faut peut-être pas porter de jugement trop hâtif à cet égard non ? Après tout si il y a un métier de guide c’est bien parce qu’il y a engagement de la responsabilité d’un professionnel dans un contexte de risque mortel, du coup ça paraît plausible qu’un jour ou l’autre un guide soit condamné pour mauvaise décision. Je ne dis pas que c’est le cas ici, mais le fait de faire appel peut signifier qu’on estime qu’il y a vraiment eu faute, et non pas parce qu’on cherche particulièrement à ce qu’un coupable paie.
Si la responsabilité légale des professionnels n’est jamais engagée, pourquoi rendre obligatoire l’obtention d’un diplôme justement accès sur la différence entre simplement faire cordée avec un inconnu, et accompagner des clients en toute sécurité ?
Dans cette triste histoire ce qui m’intéresserait c’est ce qui permettrait de comprendre pourquoi le guide n’a pas vu que la zone où il a fait attendre ses clients était à risque. Sous-estimation de l’ampleur possible d’une coulée ce jour là ?
Sinon le seul truc tout à fait objectif qu’on pourrait lui reprocher c’était de ne pas avoir de radio opérationnelle. Il me semble (les intéressés confirmeront ou non) que la radio fait partie des équipements de base qu’un guide devrait avoir dès qu’il sort des zones couvertes par les réseaux. Cela dit vu la configuration de l’accident je doute que ça aurait permis de sauver quelqu’un (on n’est pas à Cham, une intervention dans le Mercantour doit rarement prendre moins de 30 mn ?)
Ce que j’ai du mal à comprendre c’est pourquoi il n’a pas pris l’itinéraire alternatif tout proche qui semble bien plus souvent utilisé qui celui qu’il a choisi.
Accessoirement n’est-ce pas un exemple où la trace bleue figurant sur la Top25 est particulièrement mal choisie ?
(message supprimé par son auteur, sera supprimé automatiquement dans 100 heures à moins qu’il ne soit signalé)
Je crois que l’être humain ne peut accepter certaines vérités. S’il y a des conséquences avec mise en cause pour eux ou des proches, bcp n’assument pas, et se refont l’histoire dans leurs têtes. Mais au final qui détient la vérité ?
Chacun affirmera haut et fort que c’est lui, et demandera justice. Et parfois les assurances aussi, pour retrouver leurs pépettes…
Tout simplement parce que refuser l’aléa ne peut pas être une option, concernant une activité qui se pratique dans un environnement soumis à l’aléa ; en tous cas on ne peut mettre à la charge d’un professionnel de l’anticiper ou de pouvoir l’éviter. La nuance est dans la nature de l’obligation à la charge du professionnel : obligation de moyen et non pas de résultat.
https://institut-isbl.fr/accidents-mortels-dalpinisme-les-guides-de-haute-montagne-mis-hors-de-cause/
Document interessant. Il y a une ligne qui saute aux yeux:
10 - L’acceptation des risques d’accident par les victimes est en toile de fond de cette décision, même s’il n’y est jamais fait allusion. Pourtant, elle doit être écartée. L’alpiniste qui s’adresse à un guide recherche une protection accrue. Il est peu probable qu’il accepte le risque d’accident comme peut le faire celui qui pratique sans encadrement.
Ça me parait très naïf. Certes, sortir avec un guide est, ceteris paribus, bien moins dangereux que sortir au sein d’une cordée homogène, mais le paragraphe au dessus est surement exagéré.
Protection accrue oui, mais pas absolue.
Ce n’est pas évident si l’on considère l’aléa et les conditions de sa réalisation, preuve en est des professionnels ou des pratiquants expérimentés qui se font prendre. Je parle de l’aléa comme je pourrais dire la force majeure.
Ça me paraît trop général de dire « obligation de moyens et pas de résultats » sans se laisser la possibilité d’enquêter et de regarder au cas par cas. Quand bien même on prendrait cette description au mot, un des moyens à la disposition d’un guide, c’est sa connaissance du terrain et son expérience qui lui permet de prendre une décision plutôt qu’une autre (choix de course compris, ou annulation de course si besoin) pour mettre ses clients en sécurité. Si on part du principe qu’un professionnel de la montagne ne peut en aucune circonstance voir sa responsabilité légale engagée pour des décisions prises, je trouve que ça rend presque caduc l’encadrement par l’état de la formation.
Il ne s’agit pas de dire que la protection est absolue bien sûr, là on parle d’enquête au cas par cas.
Bien sûr, c’est toujours du cas par cas, dès lors qu’il y a enquête (systématique en cas de décès). Si la protection pouvait être absolue, il y aurait obligation de résultat.
L’obligation de moyen atteste bien que le législateur s’est laissé une porte ouverte pour ce qui est de l’ordre de l’imprévisible.
Peut-être faudrait-il davantage expliquer au client, avant qu’il ne s’engage avec son guide, qu’il ne se met pas à l’abri d’un aléa.
Il ne s’agit pas de dédouaner systématiquement le guide ni de refuser d’enquêter
Il s’agit de définir s’il y a faute ou erreur dans un milieu soumis a l’alea
Pour prendre un autre exemple du droit
Tu as une somme d’argent a placer, la majorité des particuliers va s’adresser à un professionnel, un banquier
Et bien en cas de crise économique grave ou si tes placements s’averent catastrophiques si tes fonds sont lessives tu ne pourra t’en prendre qu’a toi même
Le banquier est protégé par l’aléas banquaire (dans la mesure ou il t’as informé des risques et tenu au courant de l’évolution des marchés
Par contre en cas de faute (affaire Kerviel ) la ca devient condamnable, pareil pour un guide
Dans l’avalanche dont il est question il y a une multiplicité de facteurs à prendre en compte d’ou la complexité a trancher .
La justice l’a fait reste a voir les résultats de l’appel ,bien incapable de donner un avis sans avoir plus d’infos qu’un article de presse
Je le trouve au contraire plutôt logique.
Comme le dit @PlutonianMinimalism au-dessus, à quoi bon exiger d’un professionnel diplômes et compétences si on ne vérifie pas ensuite qu’il les a mis en oeuvre ?
Il est évident que le client d’un guide s’attend à évoluer dans une sécurité accrue (et donc un risque moindre) par rapport à une sortie entre amis. Le corollaire étant d’accepter que pour des raisons de sécurité le guide décide le retour ou un changement d’objectif.
Il serait intéressant d’avoir à ce sujet l’avis d’un professionnel, par exemple @Rob.Bonnet.guide qui contribue ici.
C’est ton point de vue, mais pas que. Pour ma part, je rechercherais une compétence technique d’un degré supérieur au mien, la connaissance d’un itinéraire en particulier, le partage de connaissances du terrain et du milieu, l’aide au cas où je ne pourrais pas progresser par mes propres moyens… Si je ne cherche que la sécurité accrue, autant me tourner vers un airbag ou un bouclier voire y envoyer quelqu’un à ma place
J’attendais cette remarque, pour montrer l’erreur que beaucoup font.
Non, un guide ne garantit pas un risque plus faible qu’une sortie entre amis (avec l’hypothèse que chacun des amis est moins compétent que le guide).
Le guide garantit un risque plus faible qu’une sortie entre amis sur le même itinéraire. Mais le risque pris par le guide et le client peut être aussi grand voire plus grand que le risque pris par le client dans ses sorties entre amis, sur d’autres itinéraires.
Par exemple, un client a l’habitude de faire des grandes voies à l’Envers des Aiguilles avec des amis qui ont la même maitrise que lui.
Il souhaite faire la Walker aux Jorasses, mais une cordée avec un des ses amis ne serait pas assez compétente. Il prend un guide (qui accepte car le client a un niveau suffisant en second pour la Walker, le client n’a pas fait que des grandes voies à l’Envers).
La cordée guide + client prendra plus de risque dans la Walker que la cordée client + ami dans une voie à l’Envers.
Le client n’a peut être jamais parcouru d’itinéraire comportant un risque similaire à la Walker, ses seules références de niveau de risque sont des sorties sur des itinéraires moins engagés que la Walker.
Si le client pense qu’avec un guide dans la Walker il prendra moins de risque qu’avec ses potes à l’Envers, il se trompe lourdement.
Je ne connais pas de client qui raisonnent comme ça (mais je ne connais pas beaucoup de clients), mais des proches de clients qui ont eu un accident avec un guide peuvent faire cette erreur de raisonnement.
Mauvais exemple Kerviel La comparaison serait plutôt un banquier qui aurait conseillé à son client un produit hyper risqué ou franchement hasardeux alors que le client recherchait avant tout la sécurité.
C’est pour ça qu’aujourd’hui un banquier est tenu de faire remplir un questionnaire à son client (et même de vérifier les compétences financières de son client à partir d’un certain niveau)
A mon idée c’est d’ailleurs un paramètre que le Guide ou l’encadrant doit prendre en compte : si ses clients ou les membres de son groupe veulent une sortie pépère-plaisir autant baisser largement le curseur risque et par exemple s’éloigner des pente à plus de 30°. Si c’est des clients qui veulent des sensations, de l’engagement et sont prêts à accepter le risque c’est différent.
Je suis d’accord: toutes choses qui participent d’une sécurité accrue, et que l’on attend de la compétence d’un guide.
Je n’ai pas été assez précis.
Il y a le risque objectif (qui est le même pour tout le monde, surtout pour ce qui est des avalanches), et la prise de risque.
En prenant un guide, un client s’attend d’une part à ce que le risque objectif soit mieux évalué par un professionnel, et d’autre part à ce que la prise de risque soit ensuite corrélativement minimisée.
C’est comme ça que je vois les choses.
Il faut bien que la professionnalisation aille de pair avec une responsabilisation, sinon à quoi bon ? Ensuite, toute la difficulté réside dans la traduction juridique de cette responsabilité, pour un milieu comme celui de la montagne en hiver, où chaque situation est forcément unique et mouvante, à quelques mètres ou minutes près; l’application du droit, me semble-t-il, y est là-aussi -et peut-être plus qu’ailleurs-, particulièrement difficile.