Posté en tant qu’invité par Stephen LAFONT:
Sylvain est décédé ce dimanche 6 mars, à son 2ème jour de raid dans les Encantats, entre le refuge de la Restanca et de Colomers, emporté par une avalanche.
Le ski de randonnée était ta plus grande passion. Elle occupait tes WE et tes vacances de novembre à juin.
Nous avions fait connaissance à Prague pendant notre coopération en 96. Aussitôt, nous nous étions trouvés cette passion commune qui nous a emmenés dans les Monts de Géants au début (limite Pologne-Tchéquie) puis en Autriche.
A notre retour en France, tu as trouvé un job à Tarbes ce qui t’a permis de t’adonner un peu plus encore au ski pendant les WE d’hiver, notamment avec le CAF. De mon côté, j’ai commencé à m’installer à Nantes ce qui ne m’a pas empêché de descendre te retrouver certains WE pour parcourir les pentes pyrénéennes ensemble.
Ta mutation en région parisienne ne t’a pas arrêté pour autant. Bien au contraire. Abonné aux voyages en train vers les Alpes ou même les Pyrénées, le temps d’un WE, tu as continué à assouvir ta passion tantôt avec tes amis tantôt avec le CAF de Paris.
J’ai connu des skieurs de rando compétents mais souvent un peu hautains voire méprisants. Si ta compétence et ton expérience faisaient de toi un modèle à mes yeux, ta gentillesse et ta patience étaient connues de tous tes amis, et j’ai eu le privilège d’être de ceux-là. Ouvert aux autres, tu prenais autant de plaisir à faire découvrir le ski de randonnée à des débutants sur des courses faciles qu’à enchaîner des pentes plus techniques avec tes coéquipiers habituels. C’est pourquoi, après avoir suivi les diverses formations nécessaires en 2004 tu t’apprêtais à passer chef de course au CAF de Paris.
Installé depuis 2 ans à Toulouse, j’avais le plaisir de t’accueillir certains WE le samedi matin à la Gare Matabiau pour partir ensemble dans les Pyrénées dans des endroits souvent hors des sentiers battus.
Vendredi dernier, nous avons échangés par téléphone. Tu partais Samedi faire un raid à ski d’une semaine dans les Encantats avec 2 amis. N’ayant pas suffisamment de congés, j’avais renoncé à me joindre à vous. Pour autant, tu te souviens, j’avais un moment évoqué la possibilité de vous suivre samedi et dimanche. Mais entre la météo qui ne s’annonçait pas au mieux dans les Encantats et les problèmes de manip de voiture que cela supposait, l’idée n’avait pas fait long feu. Pour autant, je devais te rejoindre ce vendredi pour ton dernier jour dans le massif avant ton retour à Paris pour une énième balade.
Cette dernière course n’aura donc pas lieu, moi qui m’en réjouissais en ce début de semaine. Dimanche matin, malgré les grosses chutes de neige et le brouillard, après hésitation, vous avez décidé de tenter le coup. Bien sûr il serait trop facile de juger a posteriori que cette décision était suicidaire. Je connais trop bien ta prudence et on expérience pour savoir que vous ne l’avez pas prise à la légère. C’aurait pu être nous, ça a été toi. Tu faisais la trace 50 m devant tes compagnons « comme d’habitude » quand un craquement s’est fait entendre. Dans le brouillard, le mouvement de la neige s’est fait tout d’abord imperceptible. Quelques secondes plus tard, tu avais disparu tandis qu’un cris de choucas retentissait confirmant aux autres l’imminence du danger. Antoine, que tu m’avais fait connaître lors de notre dernier merveilleux WE de décembre, n’a pas mis plus de 7 mn à te localiser 30 m en aval avec son ARVA et sa sonde. Mais il a fallu du temps, même à deux, pour dégager ton corps inerte enseveli sous 1m30 de neige compacte. Les diverses tentatives pour te ranimer n’ont eu aucun effet. En raison des conditions météo exécrables, Il a fallu attendre le surlendemain pour que les secours parviennent à te récupérer.
Aujourd’hui ton départ me laisse étrangement seul. Je sais au fond de moi que cela ne m’empêchera pas de continuer à pratiquer le ski de rando, mais sans toi, ce ne sera plus pareil. Ta bonne humeur inaltérable et ton dynamisme vont me manquer, vieux.
Cette histoire est là pour rappeler que, pelle, sonde, ARVA, s’ils sont indispensables, ne suffisent malheureusement pas à éviter l’accident, même lorsque leur utilisation est parfaitement maîtrisée.
Stephen