Petite histoire des frères Abalakov

Faut quand même pas exagérer non plus.
Les expés anglaises du début des années 20 avaient certes une dimension géopolitique dans le contexte de l’époque.
Mais pour celles des années 30 le contexte avait un peu évolué, et les expés « légères » de Shipton et-ou Tilman au Kamet, à la Nanda Devi ou à l’Everest en 1938 sont aux antipodes de cette optique.
Celle victorieuse de 1953 a une conception et une réalisation toute militaire, comme les Français à l’Annapurna sont dans un état d’esprit « national » dans un contexte de relèvement après 39-45 (état d’esprit relatif cependant: cf la phrase de Lachenal « je ne devais pas mes pieds à la jeunesse française »), pareil pour les allemands-autrichiens et Buhl au Nanga Parbat (« leur » montagne) ou les italiens au K2. Mais une expé légère comme celle des « prolos » parigots à la face sud de l’Aconcagua est inconcevable en URSS, et dans l’esprit et dans la forme.
Le bouquin de Cédric Gras montre bien en quoi les soviétiques partent de bien plus loin et en quoi il n’y a rien de culturel dans leurs expés qui s’inscrivent dans une forme de propagande pure; ce sera encore pire chez les chinois avec les « alpinistes de Mao » chez lesquels il y a vraiment une culture zéro de l’alpinisme au départ (qu’ils iront du reste cultiver chez les « frères » soviétiques).

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Oui Francois, tu as raison de le souligner, les grands pays européens leaders de l’alpinisme se sont servis de la conquête des grands sommets, alpins et himalayens, surtout, comme vecteur de leur nationalisme. Les Allemands se sont obstinés sur le Nanga Parbat, les Italiens sur le K2, chaque pays voulait « son sommet » après la seconde guerre mondiale.

Bien sûr, et ils étaient très en avance sur leur temps.
Pour l’expé e 1953 à l’Everest, Shipton et Tillman avaient été pressentis pour en prendre la direction. Tillman a été écarté d’emblée, trop individualiste. Pour Shipton, les choses sont allées assez loin mais il a fini par être écarté aussi, trop amateur.
Finalement, c’est Hunt qui a dirigé. Colonel, armée, rigueur, organisation etc.
Une expé dirigée par Tillman ou Shipton n’aurait eu aucune chance.

Bah, pas sûr.
Shipton a été pressenti pour diriger l’expé avant d’être écarté en 1952 pour divergence de vues: lesquelles ? Ce qui est sûr, c’est l’organisation toute militaire de l’expé de 1953, avec notamment tous les moyens, matériels et humains, qu’il faut (interdiction de se planter en 53, l’année précédente et malgré un manque de préparation les suisses avaient échoué, l’année suivante 1954 c’était le tour de ces satanés français…). D’où un succès finalement assez facile après un rigoureux plan de bataille, comparativement avec d’autres premières de cette décennie.
Ce qui est bizarre, c’est que justement, c’est l’« individualiste » Tilman qui était soldat de métier et non Shipton. Lequel avait quand même une sacrée expérience de l’Everest en étant monté à 8300 m. par la face nord en 1938, et en ayant dirigé l’expé de reconnaissance de 1951 côté népalais.

Pour en revenir un peu à Abalakov, on lui doit non seulement le fameux « Abalakov » utilisé par les glaciéristes, mais encore l’invention du « friend » :

L’invention par Vitaly Mikhaylovich Abalakov de la came Abalakov a été la première application à l’escalade du principe de la surface courbe à angle constant, avec une came basée sur la spirale logarithmique[3],[4]. Conçu pour qu’une charge produise une force de rotation, la forme de la came logarithmique permet au dispositif de tenir dans une plage de tailles de fissures sans changement du modèle de charge, le rendant ainsi prévisible et stable.

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C’est fascinant ces invention indépendantes. Existe-il une photo ou illustration de la « came Abalakov » ?

J’en ai déjà vu un schéma quelque part, mais va savoir où et sous quelle forme (papier, Web ?). À suivre.

Quoi ? Comprends pas

C’est ta première expression « domination du monde » que je trouve exagérée par rapport à la dimension géopolitique de l’histoire des expéditions himalayennes des années 20 à la fin de la conquête des 8000 en 1964.

Pourtant c’est de cela dont il s’agit avec cette expérience britannique. Le passage au Tibet pour ouvrir un comptoir commercial et battre de vitesse les chinois, ne laisse aucun doute de même que le massacre a la mitrailleuse qui y fait suite, non ,?
Les experts suivantes ont un côté nationaliste exacerbé mais ce n’est pas du niveau de cette campagne

Tu veux dire les expés.
Bof.
Les expés britanniques à l’Everest des années 30, sur le plan du nationalisme, n’ont pas, à mon sens, la même signification que les expés allemandes-autrichiennes au Nanga Parbat.
D’ailleurs les Anglais font la première du Kamet avec Shipton, de la Nanda Devi avec Tilman et Odell, ils sont « chez eux » au Garhwal, les motivations me semblent très éloignées de la géopolitique et du nationalisme.

Absolument , c’est un grand bouquin - zianx en dit suffisamment j’espère pour mettre en appétit ceux qui ne l’ont pas encore lu .

C’était assez proche de ma représentation des choses avant que je découvre ce livre. Un choc, a bien des égards

OK.
Si je te comprends bien (et Morice, à vous deux, vous z’êtes de bons vendeurs), faut vraiment lire ce livre…

pas besoin de l’acheter, il est dans toutes les blibliothèques :wink:

700 pages, qu’il a dit Zianx.
Qu’est-ce qui te dit que j’ai pas une armoire à caler ? :innocent:

Médiathèque, oui.

Non non c’est pas si long. 250 pages.

Une petite armoire, alors…

Hello,
Je n’ai pas mon exemplaire sous la main au boulot, mais c’est un sacré pavé, bien plus de 250 pages. Je suis en train de relire pour la quatrième fois, je sais de quoi je parle :grin:
Plus d’info ici : https://www.lesbelleslettres.com/livre/9782251445632/les-soldats-de-l-everest 576 pages d’après l’éditeur.

Quoi qu’il en soit c’est de (très) loin le meilleur bouquin que j’aie lu sur cette foisonnante période, passionnant de bout en bout et Davis a vraiment une plume magnifique, c’est beau à pleurer !

1ère contribution sur le forum pour moi, je ne pensais pas le faire à propos de littérature, mais j’ai vu que vous parliez de ce chef-d’œuvre, ça a été difficile de résister…

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Ah, je parlais de celui-là