Avalanche et responsabilité juridique

Bien sûr, c’est toujours du cas par cas, dès lors qu’il y a enquête (systématique en cas de décès). Si la protection pouvait être absolue, il y aurait obligation de résultat.
L’obligation de moyen atteste bien que le législateur s’est laissé une porte ouverte pour ce qui est de l’ordre de l’imprévisible.
Peut-être faudrait-il davantage expliquer au client, avant qu’il ne s’engage avec son guide, qu’il ne se met pas à l’abri d’un aléa.

Il ne s’agit pas de dédouaner systématiquement le guide ni de refuser d’enquêter
Il s’agit de définir s’il y a faute ou erreur dans un milieu soumis a l’alea
Pour prendre un autre exemple du droit
Tu as une somme d’argent a placer, la majorité des particuliers va s’adresser à un professionnel, un banquier
Et bien en cas de crise économique grave ou si tes placements s’averent catastrophiques si tes fonds sont lessives tu ne pourra t’en prendre qu’a toi même
Le banquier est protégé par l’aléas banquaire (dans la mesure ou il t’as informé des risques et tenu au courant de l’évolution des marchés
Par contre en cas de faute (affaire Kerviel ) la ca devient condamnable, pareil pour un guide
Dans l’avalanche dont il est question il y a une multiplicité de facteurs à prendre en compte d’ou la complexité a trancher .
La justice l’a fait reste a voir les résultats de l’appel ,bien incapable de donner un avis sans avoir plus d’infos qu’un article de presse

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Je le trouve au contraire plutôt logique.
Comme le dit @PlutonianMinimalism au-dessus, à quoi bon exiger d’un professionnel diplômes et compétences si on ne vérifie pas ensuite qu’il les a mis en oeuvre ?
Il est évident que le client d’un guide s’attend à évoluer dans une sécurité accrue (et donc un risque moindre) par rapport à une sortie entre amis. Le corollaire étant d’accepter que pour des raisons de sécurité le guide décide le retour ou un changement d’objectif.
Il serait intéressant d’avoir à ce sujet l’avis d’un professionnel, par exemple @Rob.Bonnet.guide qui contribue ici.

C’est ton point de vue, mais pas que. Pour ma part, je rechercherais une compétence technique d’un degré supérieur au mien, la connaissance d’un itinéraire en particulier, le partage de connaissances du terrain et du milieu, l’aide au cas où je ne pourrais pas progresser par mes propres moyens… Si je ne cherche que la sécurité accrue, autant me tourner vers un airbag ou un bouclier voire y envoyer quelqu’un à ma place :wink:

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J’attendais cette remarque, pour montrer l’erreur que beaucoup font.
Non, un guide ne garantit pas un risque plus faible qu’une sortie entre amis (avec l’hypothèse que chacun des amis est moins compétent que le guide).
Le guide garantit un risque plus faible qu’une sortie entre amis sur le même itinéraire. Mais le risque pris par le guide et le client peut être aussi grand voire plus grand que le risque pris par le client dans ses sorties entre amis, sur d’autres itinéraires.
Par exemple, un client a l’habitude de faire des grandes voies à l’Envers des Aiguilles avec des amis qui ont la même maitrise que lui.
Il souhaite faire la Walker aux Jorasses, mais une cordée avec un des ses amis ne serait pas assez compétente. Il prend un guide (qui accepte car le client a un niveau suffisant en second pour la Walker, le client n’a pas fait que des grandes voies à l’Envers).
La cordée guide + client prendra plus de risque dans la Walker que la cordée client + ami dans une voie à l’Envers.
Le client n’a peut être jamais parcouru d’itinéraire comportant un risque similaire à la Walker, ses seules références de niveau de risque sont des sorties sur des itinéraires moins engagés que la Walker.
Si le client pense qu’avec un guide dans la Walker il prendra moins de risque qu’avec ses potes à l’Envers, il se trompe lourdement.
Je ne connais pas de client qui raisonnent comme ça (mais je ne connais pas beaucoup de clients), mais des proches de clients qui ont eu un accident avec un guide peuvent faire cette erreur de raisonnement.

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Mauvais exemple Kerviel :slight_smile: La comparaison serait plutôt un banquier qui aurait conseillé à son client un produit hyper risqué ou franchement hasardeux alors que le client recherchait avant tout la sécurité.
C’est pour ça qu’aujourd’hui un banquier est tenu de faire remplir un questionnaire à son client (et même de vérifier les compétences financières de son client à partir d’un certain niveau)

A mon idée c’est d’ailleurs un paramètre que le Guide ou l’encadrant doit prendre en compte : si ses clients ou les membres de son groupe veulent une sortie pépère-plaisir autant baisser largement le curseur risque et par exemple s’éloigner des pente à plus de 30°. Si c’est des clients qui veulent des sensations, de l’engagement et sont prêts à accepter le risque c’est différent.

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Je suis d’accord: toutes choses qui participent d’une sécurité accrue, et que l’on attend de la compétence d’un guide.

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Je n’ai pas été assez précis.
Il y a le risque objectif (qui est le même pour tout le monde, surtout pour ce qui est des avalanches), et la prise de risque.
En prenant un guide, un client s’attend d’une part à ce que le risque objectif soit mieux évalué par un professionnel, et d’autre part à ce que la prise de risque soit ensuite corrélativement minimisée.
C’est comme ça que je vois les choses.
Il faut bien que la professionnalisation aille de pair avec une responsabilisation, sinon à quoi bon ? Ensuite, toute la difficulté réside dans la traduction juridique de cette responsabilité, pour un milieu comme celui de la montagne en hiver, où chaque situation est forcément unique et mouvante, à quelques mètres ou minutes près; l’application du droit, me semble-t-il, y est là-aussi -et peut-être plus qu’ailleurs-, particulièrement difficile.

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L’article mis en ligne par Bens pemet, effectivement, de se faire une idée plus précise.

Comme évoqué plus haut, plusieurs facteurs ont contribué à la survenue de l’accident et à sa gravité.

La durée de 7 ans, pour une procédure de ce type, est maintenant dans la bonne moyenne (eh oui, la Justice est pauvre). Autre chose : la procédure pénale a ceci de particulier qu’il est très difficile de contraindre un juge d’instruction à instruire quand ce dernier a déjà l’idée qu’il n’y a pas matière pour le faire, à tel point que la chambre de l’instruction est, c’est bien connu, surnommée par les avocats « la chambre de confirmation » (des décisions du juge d’instruction). Et ce, d’autant plus que les moyens de la justice sont réduits.

Mais là, on voit que la chambre de l’instruction et la cour d’appel ont au contraire, estimé, qu’il y avait matière à instruire un peu plus. Très honnêtement, on peut la comprendre, vu les facteurs qui, pour le coup, relèvent quand même de l’obligation de moyens du guide.

Vu les stats de survie évoquées en fonction du temps passé, toute la question va être de savoir si l’un de ces facteurs au moins aurait permis d’éviter des décès (on raisonne en termes de « perte de chance », d’une importance à déterminer). Sur la faute qui consisterait à ne pas avoir choisi un itinéraire moins exposé, dès lors que le guide savait qu’il n’avait pas de radio, que le temps d’intervention des secours serait donc rallongé et que le risque était quand même de 4 sur 5, on peut s’interroger, sans même évoquer l’espacement des randonneurs.

Que le guide plaide l’erreur d’appréciation, c’est sa stratégie de défense. Reste à savoir si elle convaincra, vu les faits.

Il y a aussi qu’un guide est soumis à des biais cognitifs : désir de faire plaisir aux clients, envie de boucler son circuit par un itinéraire intéressant…

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Ca ne me parait pas valable ici. Si j’ai bien compris, il, s’agit d’un raid à ski, donc avec de multiples itinéraires possibles.
Les clients sont là pour skier, on peut comprendre le non choix du taxi. Mais le guide a-til choisi l’itinéraire le moins risqué ?
Et qd il va tâter le terrain, a-t-il mis ses clients à l’abri avant (et ont ils bien respecté les consignes) ?
La justice tranchera, nous n’avons pas les élements…

Moindre, oui, mais il faut pas imaginer que si on fait une erreur de cramponnage dans une pente de neige raide (et longue) que le fait d’avoir un guide sur place va changer grande chose. Pareil pour les chutes en ski aussi. Donc oui, on a le droit d’espérer qu’on va prendre moins de risques (sur un itinéraire donné avec des conditions donnés) mais on n’est pas à l’abri d’un faux pas.

C’est un peu ce que je voulais dire en disant « ceteris paribus » mais peut-être cette jolie expression latin n’est pas si courant en français?

On lit plutôt sa traduction « toutes choses égales par ailleurs » en français; ça permet de se la péter un peu mais ça veut dire la même chose (et en latin c’est plus classe).

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Tout à fait, la comparaison avec le milieu bancaire est je pense bonne dans l’ensemble, mais pas l’exemple précis.

Cas n°1 : un client cherche à faire des placements sûrs, son banquier le met sur du 50% CAC 40 / 50% fond euro. Une crise financière survient et il y a perte de 15% en quelques semaines. On est dans l’aléa (avalanche, ou bien autre analogie : l’itinéraire est universellement reconnu comme le bon mais pas de chance aujourd’hui c’est chute de sérac ou chute de pierre imprévisible et exceptionnelle). Le banquier a utilisé ses connaissances pour faire un placement relativement sûr mais bien sûr il ne peut pas prévoir la crise.

Cas n°2 : un client cherche à faire des placements sûrs, son banquier met ses fonds dans des options Bitcoin. Le prix crash de 50% en 2 jours et le client perd tout. Le banquier est responsable, il a mal choisi l’investissement (itinéraire) au regard de la demande initiale du client.

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Tu peux attendre d’un guide qu’il juge de ton niveau et propose un itinéraire en conséquence, et s’adapte sur le terrain à toute information nouvelle ( en choisissant un plan B si il se rends compte que ton niveau de cramponnage est totalement aléatoire ou si c’est impossible en cherchant à bétonner la sécu). C’est toujours mieux d’agir en amont d’un accident, et on attend d’un professionnel d’un secteur d’être plus à même de limiter la survenue de celui-ci de par son expérience ou sa formation.

Ceci dit, tout ces débat sur ce qu’on attends d’un guide est caduc pour ce sujet : ce ne sont pas les clients qui poursuivent le guide, mais leur famille. Qui n’y sont pour rien dans l’acceptation des risques, le choix du guide ou de la course, et sont même probablement extérieures au milieu de la montagne et à toutes ces subtilités autour de la prise de risque. Ils ont juste perdu des proches et estiment qu’une faute à été commise (ou peut être même qu’ils sont juste en recherche de réponse), c’est donc à la justice de faire son boulot. Le seul constat qui s’impose c’est que 7 ans c’est très long, pour eux comme pour le guide incriminé.

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Oui vous avez raison pour kerviel ,puisque la faute commise l’était envers son employeur pour le reste plutonium c’est exactement ce que je dit ,petite nuance "un placement sur ca n’existe pas " (même en bon père de famille n’est pas sur à cent pour cent )
Pour en revenir à l’affaire de ce que j’en ai lu ce matin, le parquet ds ses réquisitions hier je crois, n’est pas allé sur le domaine de l’aléa mais estime que le guide a commis une succession d’erreurs qui peuvent s’à parentérale à une faute on verra au final ce qu’il en sera
On en revient toujours à la notion d’erreur ou de faute

Et pour cause.

Il y a peut etre aussi une question financière. Ça doit couter une blinde 4 heures de route de taxi. Qui aurait dû payer ?

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Il y a des bus, ça prend juste une journée complète pour aller de Entraunes à Barcelonette !
Sinon les frais c’est le client qui les paye en général… (en tous cas quand il s’agit d’un engagement)

Est-ce que si quelqu’un voit passer le jugement final (dans quelques semaines ou mois je suppose) il peut venir mettre le lien ici ? Merci !

Exactement. Mais ce n’est pas moi que a entamé le sujet d’acceptation des risques par le client, mais l’article juridique cité par Robertin. J’ai juste rebondi la dessus.

Juridiquement, en termes d’analyse ça ne change rien.

Si vous avez l’occasion de lire le guide et le procureur (Alexis mallon ,Eric décamp, jacques dallest), ça pose bien les choses (accident d’Alexis-formateur ensa-avec une cliente dcd dans une avalanche)

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